Bonjour, j’ouvre cette file pour partager avec vous les nouvelles économiques du Royaume-Uni. Comme je travaille à Londres [je ne suis pas trader !] et que j'ai accès à des infos qui ne sont pas spécialement relayées ailleurs, je me dis que ça peut intéresser ceux qui cherchent à élargir leur vision globale.
Aujourd'hui je vais vous parler de cette sensation de "Déjà vu" (expression anglaise), l'histoire qui est en train de se répéter sous nos yeux.
Tesco, le nouvel Enron ?
La saison des résultats trimestriels va commencer... et comme d'hab, elle est mauvaise, très mauvaise. Encore plus mauvaise que prévue même, plus mauvaise qu'avant.
Au Royaume-Uni plane le spectre de Enron, avec Tesco qui a admis publiquement avoir surévalué les résultats trimestriels de juin de 250 millions de livres sterling (315 Meur), sur un résultat publié de 1,1 milliards, cela fait seulement un peu moins de 23%. Une bagatelle en sorte... Sauf que leurs auditeurs, c'est PWC et ils ont signé les comptes comme étant conformes à la réalité.
Cela ne vous rappelle rien ?
Pour la petite histoire, les auditeurs auxquels j'ai affaire à mon boulot sont de PWC aussi, que je surnomme 'Papier-WC', mais comme aucun d'eux ne parle Français, je me délecte seul et ils ne se rendent compte de rien... pour l'instant. Cependant, j'ai remarqué que pour l'audit trimestriel Q3 qui a débuté lundi, ils sont vachement plus tendus. En attendant, c'est l'ensemble du secteur qui trinque et comme dans l'affaire Worldcom/Lernhout&Auspie/Enron, je m'attends à avoir un journaliste du Financial Times ou n'importe quel autre fouille-merde venir scruter et pointer la moindre irrégularité dans les rapports de résultats trimestriels ou annuels. Au passage, ils emploieront des techniques journalistiques habituelles, comme aller demander directement aux intéressés. Comme ces entreprises sont sous pression des marchés depuis 2008 [Tesco a vu sa part de marché décliner graduellement et continuellement depuis], la politique salariale tendue a généré des frustrations, surtout au niveau des "petites mains", celles qui ont les bras dans le cambouis des comptes, qui voient la merde passer et qui ne peuvent rien dire parce qu'elle est planquée sous le tapis par le management. Les petits comptables qui ont vu leur pouvoir d'achat au fondre comme un neige au soleil et qui traînent leur tristesse chaque matin pour aller exécuter leur travail démotivant au possible ne demandent pas mieux que d'avoir une oreille compatissante pour les écouter et une épaule réconfortante sur laquelle pleurer toutes les larmes de leur petit corps amaigri par les privation alimentaires (25% des adultes ne mangeraient pas à leur faim dans les banlieues pauvres de Londres, se privant pour nourrir leurs enfants, ce qui n'est parfois pas suffisant car une enquête a révélé cette semaine que enfant sur 10 arrive à l'école sans avoir rien mangé depuis la veille). Toutes ces choses qu'ils à raconter... il ne faudra pas trop les forcer pour que ça sorte. Quelques pintes au pub et ce sera dans la boîte.
Avec Enron, c'était le secteur de l'énergie qui a été concerné. Le gaz et l’électricité, tout le monde en a besoin, ce sont des biens de consommation courante essentiels à la vie économique et à la vie tout court.
Avec Tesco, c’est le secteur de la grande distribution, celui-là même qui s’est attelé à la rude tâche de tuer el petit commerce de proximité depuis les années 60, et qui est pratiquement arrivé à ses fins. Tesco, c’est le No1 anglais et le No2 mondial. Pas une petite PME donc. La nouvelle du « trou » de 250 millions a eu l’effet d’une bombe, et ce pour plusieurs raisons : - La grande distribution va mal. Pour garder la tête hors de l’eau, ils sont obligés d’aller enregistrer des revenus imaginaires ; - Toutes les entreprises cotées en bourse qui n’ont pas vraiment créé de richesses depuis 2008 sont techniquement dans le même cas que Tesco : leurs cours de bourse a augmenté, mais sans réelle contrepartie ; - Les engagements d’audit interne et de bonne gouvernance qui ont été pris après l’affaire Enron ne sont pas respectés. Tesco est soumis à SOX et ceci n’a pas empêché cela ; - De par sa taille dans le paysage de la Grande Distribution (c-à-d la diffusion de nourriture vitale à la population) c’est un nouveau TBTF (Too-Big-Too-Fail) qui risque de nous foutre dedans, en plein ; - La confiance des analystes envers la qualité des audits rendus par les grandes maisons (les Big 4 … qui étaient 5 avant Enron et qui maintenant risquent de se retrouver à 3 ) est sérieusement remise en question ;
Bref, le rallye haussier qu’on a connu en bourse, les gens commencent à clairement réaliser que tout cela n’est que du vent ! Du vent ! Que croire du coup ?
Encore quelques semaines avant que la conscience collective ne redécouvre les qualités des actifs tangibles, comme l’or. L’or ne ment pas, il ne peut pas mentir.
C’est sur ce fond de crise de confiance qu’on voit les bourses baisser cette semaine et malheureusement je ne peux que regretter tous ces journalistes « éclownomiques » continuer à pérorer que non, tout va bien, ce n’est qu’une petite correction saine, tout à fait normale après une telle hausse qu’on a connu, que ce n’est pas la fin du marché haussier… que demain tout ira mieux. Cela fait 7 ans qu’ils nous ressortent ce charabia.
Fort heureusement, la vérité finira toujours par ressurgir au grand jour, ce n’est qu’une question de temps. Avec la planche à billets, ils en ont gagné pas mal, mais jusqu’à quand ? La seule chose qu’ils arriveront à faire, c’est de ruiner la confiance que le peuple a dans sa monnaie, qui a été bâtie sur plusieurs générations. Non seulement ils vont anéantir cet héritage de nos ancêtre, mais en plus ils sont en train de mettre en nantissement la richesse non encore créée par nos enfants, via le mécanisme de l’endettement en boule de neige.
J’attend encore qu’un autre Tesco-Enron ne surgisse. Cela fait 7 ans que la croissance est négative et l’intégration de la prostitution et du trafic de drogues ne suffira pas à cacher le fait que les politiques économiques menées depuis 2007 ne produisent que de la croissance négative.
Cette affaire va nous rappeler douloureusement qu’on a tous été pris dans une grande illusion collective où tout le monde se devait de participer à la croissance et que si elle ne se traduisait pas dans l’augmentation des chiffres d’affaires des entreprises, il était devenu acceptable de la créer de toutes pièces en l’inventant sur papier, juste pour pouvoir continuer à justifier la hausse du cours des actions en bourse. Le spectre de 2001 ressurgit. Mais là il n’est plus question de nouvelle économie, mais d’économie traditionnelle.
Avec Tesco qui faillit, c’est la crise qui s’invite (à nouveau) dans notre assiette.
Bonne week-end à tous !
_________________ The-GOLDfisher.com @The_GoldFisher « Techniquement nous n’imprimons pas cette monnaie. » Ben Bernanke « L’or est la seule monnaie qui n’est pas imprimable contrairement aux USD, EUR, JPY... » A. Greenspan
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