Il y a une page dans le Franc VIII sur le sujet valeur-métal / valeur numismatique. Page 54. C'est pour l'or, mais un raisonnement tout à fait similaire peut être mené pour l'argent.
Ce que dit en substance Michel Prieur, c'est que la hausse du prix de l'or fait que la valeur-métal d'une pièce rattrappe sa cote numismatique. Dans ce cas la pièce bascule du côté du métal et sera rachetée pour la fonte [ou la thésaurisation-métal AMHA]. Tel qu'il l'écrit, ces pièces relativement communes sont condamnées à être fondues.
Il écrit notamment "une hausse supérieure du métal éliminerait d'autres cotes, encore sauvegardées à ce niveau". Il explique clairement que les cotes les plus basses (années courantes et/ou bas états de conservation) ont vocation à disparaître du bouquin.
L'image qui se forme est celle d'une marée montante qui recouvre et noie progressivement les cotes numismatiques qui seraient fixes ou presque.
Les cotes numismatiques résultent de l'équilibre offre/demande des collectionneurs, alors que le nombre de collectionneurs augmente moins vite que le nombre d'investisseurs-métal. Donc les cotes numismatiques augmentent moins vite que le prix du métal.
Pour autant, peut-on imaginer une pièce rare partir à la fonte ? Non, car le collectionneur continue à lui attribuer une plus-value numismatique, c'est à dire qu'il est près à payer plus cher que le prix du métal.
Donc, à mon avis, l'image de la valeur-métal qui monte et qui noie des cotes numismatiques (qui seraient fixes) est erronnée.
Il me semble plus logique et plus réaliste de raisonner sur la prime numismatique.
Pour schématiser, si le prix de l'or doublait, il y aurait peut-être 100 % d'investisseurs métal en plus (un doublement aussi) mais seulement 20 % de collectionneurs en plus.
Exemple : Au moment de l'édition du Franc VIII (6 février 2009), un nap de bourse cotait 134,10 €, une 20F 1861 BB cotait 350 € en SUP. Ma façon de voir les choses, que j'ai déjà amplement expliquée, c'est que celui qui achetait cette pièce à 350 € payait 134 € de valeur métal et 216 € de prime numismatique.
Quand le nap de bourse vaudra 400 €, combien vaudra cette pièce ? - si maintien de la prime numismatique en valeur absolue : 400 +216 € = 616 €
- si baisse de la prime numismatique, valeur de peut-être 500 €. Comme l'ont fait remarquer plusieurs foreumeurs avant moi, la prime numismatique des naps I a déjà fortement baissé. Voici les derniers prix constatés par JC Marti sur la baie : 20F coq, 85 ventes à 192/206 euros 20F Napoléon III 84 ventes à 188/210 euros 20F Napoléon Ier 27 ventes à 210/235 euros Ca donne une prime numismatique aux nap I de 25 à 30 euros environ. Dans le Franc III (2000), un Nap I "ordinaire" cotait environ 75 €, alors qu'un nap de bourse valait 40 €. Donc, depuis 2000, la prime a un peu baissé en valeur absolue, mais surtout, elle s'est effondrée en pourcentage. A l'époque, le Nap I avait une prime de pas loin de 100 %, maintenant c'est plutôt 10 ou 15 %. Je sais que ce calcul est très grossier mais ça donne une idée.
- si je considère que l'augmentation du métal amène 20 % de collectionneurs en plus, alors que le nombre de pièces reste le même, ça peut tout de même faire augmenter la rareté relative de cette pièce. A supposer qu'en conséquence la prime numismatique augmente aussi de 20 %, la pièce vaudrait alors 400 + 216 x1,2 = 659 €. C'est le cas le plus favorable et ça donne une augmentation de valeur de +88% par rapport à la cote 2009.
En tout cas, elle vaudra beaucoup moins que les 2 x20 F or et 1 x 10 F or "de bourse" que l'investisseur-métal pouvait largement se payer avec la même somme (335 € à la cote CPr Or du 6 février 2009). Cet investisseur-métal aura ces 3 pièces qui vaudront environ 2 x400 + 1 x 230 = 1030 €. Augmentation de valeur de +207 % par rapport aux 335€ du 6 février 2009.
En résumé : les cotes numismatiques augmenteront, en valeur absolue. La prime numismatique (cote numismatique - valeur métal) baissera (le plus probable au vu de ce qui s'est passé sur le nap I), stagnera, ou augmentera un peu (genre +20 %). Mais en tout cas, les cotes numismatiques augmenteront moins vite que le métal. Et donc, les pièces à forte valeur numismatique sont, à mon humble avis, un investissement, pour ce qui est de parier sur la hausse des métaux précieux, bien moins efficace que les pièces ordinaires.
_________________ Un tiens vaut mieux que deux tu l'auras
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