Bonjour,
gr33n a écrit:
Quand bien même l'interprétation sur la TMP serait différente d'une pièce à l'autre.. avez vous, une réponse de l'administration fiscale pouvant lui être brandie (brandy?) devant le nez, en cas de taxation sauvage à la TMP? (parce que sans écrit, les pauvres agents du fisc déjà débordés par la réglementation taxeront, il faut les comprendre, quelque soit le type de pièce)
je pense que nous nous sommes mal compris. L'interprétation de la TMP n'est pas différente d'une pièce à une autre. C'est la classification fiscale dont les critères sont précis (quoiqu'on en dise et donc ne nécessitent aucune explication complémentaire) qui fait qu'une pièce est soit taxée au moment de sa cession comme « métaux précieux », soit comme « bijoux et assimilés », soit comme « moyen de paiement légal », c'est à dire « bien meuble ».
gr33n a écrit:
Selon cette interprétation sélective, ces pièces sont elles (en théorie) soumises à la TMP:
Métaux précieux :
*napoléon non refrappé
*croix suisse de 1897 à 1935
*50 pesos de 1921 à 1931
*souverain ancien avant 1837
Moyens de paiement légaux :
*souverain récent
*souverain ancien à partir de 1837
*krugerrand
*1/4 krugerrand
*mapple leaf ou nugget kangaroo
*AGE
Bijoux et assimilés :
*refrappe Pinay
*vera valor
*50 pesos depuis 1943 (encore frappé de nos jours chaque année)
*croix suisse de L1935 à 1949
gr33n a écrit:
Le rescrit fiscal est déjà un début de piste, non?
Certes le rescrit permet d'obtenir la position de l'administration fiscale. Mais la position de l'administration, exprimée dans un rescrit ou dans un BOI, n'est pas la loi. Seule la loi et l'interprétation de la loi par un juge peuvent devenir contraignantes.
On a tendance à courber l'échine devant les écrits du fisc systématiquement. Contrairement à une idée reçue ces écrits sont parfois des non-sens. Je vous en donne un exemple.
La société **** a demandé par rescrit à l'administration, et pas n'importe laquelle il s'agit de la Direction de la législation fiscale de Bercy, de se prononcer sur l'éligibilité à la TVA des ventes de monnaies à cours légal en argent. Vous trouverez la réponse
ici .Venant de la DLF on aurait pu en toute logique s'attendre à une démonstration sans faute.
Celle-ci commence par faire, sur le sujet de la TVA, une distinction entre «
monnaies courantes, qui sont des moyens de paiements légaux » et «
monnaies de collection » en réaffirmant néanmoins que les moyens de paiements légaux sont exonérés de TVA. Pas de chance, le concept de "monnaie courante" n'existe pas.
Puis utilisant la définition donnée plus haut la DLF classe derechef les monnaies d'argent en collection. Or la Cour de justice européenne (CJUE) dans un arrêt de 1985 a énoncé plusieurs critères permettant ou non déterminer si un objet est de collection ou pas. Parmi ces critères deux, l'arrêt de la production et la rareté, ne sont à l'évidence pas applicables à des monnaies en argent qui sont produites à des millions d'exemplaires chaque année (American Silver Eagle, Wiener Philharmoniker, Feuille d'érable, etc.). Je rappelle que la CJUE est l'instance suprême du droit dans l'UE. Alors à votre avis qui a raison ?
Mais la DLF en prise avec une logique étrange renvoie (note de bas de page 1 dans la réponse à ****) au
BULLETIN OFFICIEL DES IMPÔTS 3 K-2-08 N° 104 du 10 DECEMBRE 2008 - TAXE SUR LA VALEUR AJOUTEE (TVA). BIENS D'OCCASION, OEUVRES D'ART, OBJETS DE COLLECTION OU D'ANTIQUITES. DEFINITION DES OBJETS DE COLLECTION (C.G.I., art. 98 A de l'annexe III).
Il vous suffit de lire ce BOI pour comprendre où est le problème. En toute logique vous devriez tomber de votre chaise.
Le paragraphe A traite de « DEFINITION COMMUNAUTAIRE DES OBJETS DE COLLECTION, PRECISEE PAR LA JURISPRUDENCE DE LA COUR DE JUSTICE DES COMMUNAUTES EUROPEENNES (CJCE) ».
Et le paragraphe B de la « DEFINITION DES OBJETS DE COLLECTION EN DROIT INTERNE ».
Qu'y trouve-t-on ? Tout simplement le rappel des critères arrêtés par la CJUE en 1985 et désormais incorporés au droit fiscal français par ce BOI (voir paragraphe 10 :
Les précisions apportées par la présente instruction sont applicables à compter de sa publication).
Je cite l'article 7 de ce BOI :
Dès lors que les critères (rareté, utilisation différente de la destination initiale, transactions spéciales en dehors du commerce habituel des objets similaires utilisables, valeur élevée, réalisation d'un pas caractéristique de l'évolution des réalisations humaines, ou illustration d'une période de cette évolution (mobilier « Art nouveau » ou « Art déco », par exemple) ci-dessus énoncés sont respectés, les meubles meublants de moins de cent ans, les articles de joaillerie, d'orfèvrerie et de bijouterie ainsi que les articles des arts de la table et de mode vestimentaire répondent à la définition d'objet de collection.
Avouez qu'il est tout de même cocasse de voir la DLF prendre une position à l'inverse du BOI qu'elle a elle-même fait publier tout en y faisant référence.
J'en termine avec cette superbe prose de la DLF adressée à ****.
En page 2 de sa réponse la DLF, pour justifier l'exigibilité de la TVA sur les monnaies en argent, a cette phrase «
… en raison notamment de leur valeur actuelle supérieure à leur valeur faciale » … et
« par conséquent, de telles pièces en argent fin constituent des pièces de collection dont la livraison est soumise à TVA. ». Ici la DLF qui avait pourtant un peu plus haut mis en référence l'arrêt de la CJUE sort son propre critère. De quel droit ? La CJUE a-t-elle mentionnée ce critère ?
D'ailleurs sur ce dernier point il n'échappera pas aux aficionados que depuis que l'Utah a adopté l'or et l'argent comme monnaie légale à la valeur intrinsèque des monnaies émises par l’État fédéral américain, ce critère d'exclusion tombe de fait pour l'American Silver Eagle. De la même façon les monnaies de type Libertad émises par les États unis mexicains ont cours légal pour leur poids d'argent et donc, selon le critère inventé par la DLF, sont exonérées de TVA à l'importation.
Du grand n'importe quoi en résumé.
Cette situation ubuesque, décalage important entre valeur faciale et valeur intrinsèque, est la conséquence des pratiques déviantes des États sur la monnaie. Ceux-ci jouent de façon honteuse avec la monnaie. Jusqu'à 1914 (et avec quelques exceptions entre 1920 et 1935), les monnaies faites de métaux précieux étaient destinées à la circulation et leur valeur intrinsèque était en relation cohérente avec leur valeur faciale à quelques % près. Depuis cette époque révolue la monnaie est déconnectée de toute référence intrinsèque.
L'émission de monnaie en métaux précieux est maintenant utilisée pour financer les ateliers monétaires nationaux en engrangeant un seigneuriage monstrueux. ... Lorsqu'on joue ainsi à tout va avec la monnaie, il ne faut donc pas s'étonner de constater que tout ceci ne rentre pas en parfaite cohérence avec la symbolique du moyen de paiement.