Hier soir, tard, sur France 3, un reportage sur la prétendue vertu retrouvée de la finance :
http://www.france3.fr/emissions/pieces-a-convictionAu sommaire, la pseudo réforme Moscovici sur la séparation bancaire, les prêts immobiliers français libellés en Francs Suisse, le business des rachats d’assurances décès, et l’interview du gestionnaire d’un fond de placement controversé, « The Vice Fund », qui investit exclusivement, et avec succès, dans l’alcool, le tabac et les armes, expliquant doctement que le vice paie plus que la vertu en comparant ses revenus à ceux d’un fond éthique catholique. Curieusement, ses propos télescopent dans mon esprit embrumé le dernier rapport de Henri Regnault qui, après nous avoir expliqué que si l’or papier n’est qu’un piège à cons et l’or physique un investissement bien trop risqué, affirme que la seule valeur potentielle de l’or physique réside dans son éventuelle assurance apocalypse :
Henri Regnault a écrit:
L’or en tant qu’assurance contre le désastre
J’espère pour vous que votre résidence est assurée contre l’incendie. Pour autant, vous ne souhaitez pas qu’elle brûle: vous acceptez donc chaque année de payer une somme en espérant que vous payez à fonds perdus, que ce coût annuel ne se traduira jamais par une recette car ce serait le signe qu’un grand malheur vous est arrivé. De même... et encore plus, si vous couvrez le risque de votre décès pour subvenir aux besoins de votre famille dans cette sinistre hypothèse, vous n’êtes pas suffisamment masochiste pour souhaiter décéder dès le lendemain de la souscription pour éviter de payer la deuxième mensualité de prime : ce serait pourtant le meilleur résultat financier atteignable, le meilleur ratio gain / dépense !
Il en va de même pour l’achat d’or dans une optique assurantielle. Mais de quel risque pourriez-vous donc vous couvrir en achetant de l’or? Tout simplement, si j’ose dire, de l’effondrement du système monétaire et financier de votre pays ou pire encore (mais tout aussi envisageable) du monde entier: effondrement boursier, krach obligataire majeur, faillites bancaires en séries qui rendraient illusoires tout mécanisme de garantie des dépôts, cette garantie fut-elle limitée à 100.000 dollars ou euros. Auquel cas l’or vous permettrait théoriquement de conserver, voire d’améliorer le pouvoir d’achat des sommes monétaires préalablement converties sous forme métallique. Mais votre bonheur serait très relatif, car noyé dans un océan de malheurs, de drames indicibles sur fond de troubles civils et militaires. Et il ne s’agit pas d’abstractions pour intellectuels évaporés mais très concrètement... de chômage sans aucune indemnité (suivant votre âge: pour vous, vos enfants ou petits-enfants), de retraites non payées ou payées en monnaie de singe (suivant votre âge: la vôtre ou celles de vos parents), d’émeutes alimentaires (j’ai vécu ça en Tunisie en janvier 1984... ma voiture y a flambé, et l’assurance... n’assure pas !), d’hyperinflation (les Allemands se souviennent de quoi il s’agit... et ils emmerdent toute l’Europe avec ça, à tort et à travers!). Vous avez donc toutes les raisons de souhaiter que le risque assuré ne se réalise pas.
Et s’il venait à se réaliser... encore faudrait-il que vous puissiez concrétiser ce pouvoir d’achat emmagasiné dans de l’or, qui ne sera que virtuel tant que vous ne l’aurez pas converti dans la probable nouvelle monnaie ayant cours légal, et donc tant qu’il ne se sera pas incarné en un véritable pouvoir libératoire. Ce qui suppose que les Etats, ces grands ennemis de l’or des particuliers, ne réquisitionnent pas votre or, ne le confisquent pas à l’occasion de la moindre transaction apparente, ne vous condamnent pas à la clandestinité aurifère. Si vous êtes un suppôt de la détention de l’or, soyez logique... soyez libertarien, c'est-à-dire anarchiste de droite! L’or des particuliers et l’Etat, c’est le feu et l’eau... ils ne s’aiment pas vraiment! Les Etats n’aiment l’or que dans les réserves de leur banque centrale. En cela ce sont des adeptes de Platon, qui, dans sa Cité idéale, réservait la détention des métaux précieux à la Cité et en prohibait la détention par les citoyens (mais il ne trouvait rien à redire à l’esclavage... détenir de l’or était scandaleux, posséder des esclaves était normal... tout est donc relatif !).
Il ne vous reste plus qu’à apprécier à l’aune de cette analyse si vous avez intérêt à détenir une fraction de votre patrimoine sous forme métallique. Mon sentiment, tout à fait personnel et qui n’engage que moi, est que l’or physique n’a de sens que par rapport à un scénario apocalyptique: mais l’apocalypse devant être ce qu’elle doit être, c'est-à-dire sans retour, ne vaut-il pas mieux jouir du temps présent, investir en foie gras, caviar, champagne et autres vins de France et du monde en chantant avec Anna Netrebko le libiamo de la Traviata! Et, au moins, cela soutient la consommation et favorise la relance de l’économie !
Et on se retrouve bel et bien avec l’investissement dans le vice le moins répréhensible : la gourmandise. Une fois n'est pas coutume, je vais endosser la robe de l'avocat du diable: ne devrait-on pas songer à épargner quelques bouteilles d’alcool en se disant que ce sera toujours plus liquide que des napoléons qui risquent de devenir des « pièces à conviction »… pour cons vaincus ?